mercredi 25 août 2010

Les demoiselles de Toul

Non, ce ne sont pas les pensionnaires des nombreux bordels dont la ville de garnison était bien équipée jusqu'au début du siècle dernier, ni les pensionnaires des sœurs de la Doctrine Chrétienne, ni un tableau de grand maître !
Les demoiselles de Toul ne sont pas de marbre, mais en pierre taillée dans un beau calcaire clair identique à celui des remparts, cylindres plus ou moins tronconiques, coiffés d'un joli chapeau pointu. Ce sont des éléments de défense dans les fossés des fortifications de la ville.

Extraits d'un Glossaire de la fortification bastionnée :

Dame ou demoiselle : obstacle massif, généralement cylindrique ou tronconique, posé sur le faîte d’une traverse, pour empêcher que celle-ci ne serve de cheminement à l’assiégeant.


Leur papa n'est autre que Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban, à qui Toul doit une grande partie de sa physionomie.

Pour les saluer, faisons le tour de la ville extra-muros...

Derrière le Boulevard de Pinteville, près des silos, 2 demoiselles protègent le bassin devant l'entrée des eaux issues du ruisseau de Franchemare :




A la sortie des eaux (l'Ingressin passe sous la ville), il y a deux autres demoiselles. Une protège la vanne qui règle le niveau d'eau dans les fossés ouest de Toul, au pied de la cathédrale. Un des plus beaux endroits de la ville :




Au même endroit, une seconde petite demoiselle est aujourd'hui prise dans le bitume du trottoir qui passe le long du poste de garde au-dessus de l'émergence de l'Ingressin. À l'origine, on ne pouvait pas pénétrer en ville à cet endroit :


Non loin du champ de foire où se trouve la piscine des glacis et la salle de sport, une demoiselle solitaire veille sur le canal de la Marne au Rhin, à demi enfouie sur la rive entre le pont de la voie stratégique et le pont levis :


Enfin, une dernière veille sur le canal, juste avant le port de France. Elle protège une vanne au niveau de l'unique demi-lune des fortifications de Toul. Une pierre gravée "1846" renseigne sur l'année de sa restauration, comme le font quelques autres pierres dispersées çà ou là dans les remparts.





Je résume :
Deux aux silos + deux à la sortie des eaux + une au pont levis sur le canal + une avant le port de France : cela fait en tout six blanches demoiselles aujourd'hui bien pimpantes et innocentes.
Peut-être y en eut-il d'autres ?

J'imagine parfois les soldats du 18ème siècle, cuirasse luisante et casque empanaché, mousquet dans une main, tentant de franchir l'obstacle ! Ce devait être une tentative très casse-cou se terminant inévitablement par un plongeon dans les eaux glauques et pestilentielles des fossés.

(Photos du 26 juin 2010)

3 commentaires:

  1. Très instructif, merci pour cette leçon d'histoire ...

    RépondreSupprimer
  2. c'est à propos de la légende de la photo :
    "Au même endroit, une seconde petite demoiselle est aujourd'hui prise dans le bitume du trottoir qui passe le long du poste de garde au-dessus de l'émergence de l'Ingressin. À l'origine, on ne pouvait pas pénétrer en ville à cet endroit"

    petite rectification : il y a longtemps ( vers 1960 ...) on pouvait déjà entrer en ville par ce chemin ; MAIS il y avait une petite porte fortifiée avec un pont-levis . La demoiselle enfouie dans le goudron protégeait le passage vers le fossé situé derrière les maisons du boulevard

    RépondreSupprimer
  3. Vauban n'avait aménagé que 3 portes fortifiées pour accéder dans la ville : Porte de Metz, Porte Moselle et Porte de France. Une quatrième (la porte Jeanne d'Arc) fut ouverte vers 1900.
    Mais il y avait effectivement des passages piétons. Je n'ai pas connu celui dont vous parlez, et je ne sais pas quand la rue Drouas a été prolongée et que les remparts ont été percés au niveau de la sortie des eaux ?
    Un autre passage "piéton" semblable à celui que vous décrivez existe encore derrière la poste.

    (Merci pour votre précision.)

    RépondreSupprimer

Dis-moi voir ?